1 décembre 2008

Nous vous livrons, les impressions de Marie et Elise, deux étudiantes du Conservatoire qui ont participé aux ateliers mis en place à l’occasion de l’accueil du spectacle Cannibales.

Samedi 22 / 11h–13h et 14-17h
Atelier d’écriture avec Ronan Chéneau. La matinée commence par des lectures de différents textes puis l’après-midi Ronan nous propose un exercice d’improvisation à partir des textes écrits le matin.
Nous sommes profondément touchés par la générosité de toute l’équipe et du cadeau que nous a fait David en nous invitant à participer à « Cannibales ». Sa confiance, l’attention de toute l’équipe à notre égard et leur grand professionnalisme. Nous tenons à remercier l’équipe du lieu unique, Corinne Gaillard, Karine Bellanger, David Bobee, Ronan Chéneau et toute l’équipe des comédiens. Cette expérience est pour nous incroyablement formatrice dans notre parcours d’apprentis comédiens.

Marie et Elise

Pour faire suite au travail mené par le metteur en scène David Bobee, les élèves du Conservatoire d’art dramatique, ont suivi un atelier d’écriture proposé par l’auteur Ronan Chéneau. A découvrir : deux textes écrits pendant cet atelier.

Le texte de Salomé
voici le texte que j'ai lu lors du travail avec Ronan :
"Ici seuls sont libres ceux qui sont libérés de l'argent, libérés des pensées de l'argent, parce que les pauvres
non, les gens,
pensent à l'argent,
mais les riches touchent l'argent, ils n'y pensent pas,
ils le touchent,
ils touchent de l'argent, et après ils touchent des Rolex et des jets privés.
Le jet privé emmène la riche à Ibiza sur le bateau que touche un autre riche :
lui touche le bateau,
elle touche la Rolex,
il touche la robe Dior,
elle le touche,
ils se touchent.

Le paparazzi retouche la photo,
la rédactrice de Voici qui voit ici la photo,
la rédactrice qui dit "on touche du lourd là Jean-Pierre !",
la rédactrice qui pense toucher les pauvres
non, les gens,
avec la touchante histoire des touchés du yacht de "Touche-ma-Rolex" à Ibiza,
"ça a l'air Olé-olé Ibiza !" lance Robert à sa femme Robert sur le canapé cuir,
(l'argent touché par Robert et Roberte égale canapé dans 10 ans par crédit)
Robert qui lit Voici sur le canapé et Roberte qui fixe la bière de Robert au dessus du canapé cuir,
Roberte qui fixe la goutte de bière au menton de Robert qui tourne la tête pour lui parler de l'histoire des toucheurs dans Voici à Ibiza,
la goutte qui tombe sur le canapé cuir,
et l'arrêt cardiaque de Roberte qui...

Pendant ce temps à ToucheLand,
Chloé de Touche-Machin-Darty-Bouygues FD (Fille De)
achète comptant un lot de quatre canapés cuir pour meubler son salon dans son nouveau T-11,
et devant le vendeur baveur toucheur de 4-fois-Robert&Roberte en un seul chèque,
Chloé de Touche-Machin-trois-petits-points touche les canapés cuir,
et de son grand sourire blond Chanel :
"J'espère qu'il est champagne-proof !"

Et encore merci pour ce stage, c'était formidable.
à bientôt!
Salomé

Le texte de Lola
Toi, tu sais tout des richesses du monde, tout des endroits fabuleux, petits recoins pittoresques et inaccessibles aux yeux des autres, inaccessibles aux pieds des autres, inaccessibles aux doigts des autres. Les autres, les innocents. Toi, tu as voyagé, visité, exploré, défloré chaque partie du monde, monde que tu tiens dans tes mains, monde mondain de demain dans tes mains maniérées, manucurées, si bien soignées. Toi, tu vois la vie se vivre sous tes fenêtre, vie vivante, vivier de vendus parvenus prêts à tout pour venir au sommet s’endormir sur nos têtes courbées, nos corps cassés par l’effort harassant de se taire, ne rien faire et garde tes sanglots qu’il n’entendent rien là-haut. Ne perturbe pas la paix du sommet qui amasse des sommes. Dernière sommation. Le sommet de ta vie est au sommet du monde mais préserve ton sommeil et rentre dans la ronde, monde rassasié au sourire émaillé qui dédaigne les dindes de la farce qui se plaignent. Ecrase la gueule béante qui crache sa souffrance dans les rues d’une France d’en bas, du caniveau. Toi, replet repu de la chair du pauvre, caché en ton repaire tu repars vers ta paire sans parler aux rebuts. Rebuté, tu te baffres et bois à ma santé, gala de charité, sans bien te soucier de l’avenir , mon avenir non avenant, écrasé, foulé aux pieds des élus de ta société, ta caste vénérée, à peine privilégié, soigneusement sélectionnée. Oui, tu sais tout, tu vois tout, tu connais tout, toi, dans ta jeunesse dorée, parfaite, bien éduqué tous frais payés. Mais moi, est-ce que tu me vois ?

Lola Coipeau.